dimanche 28 février 2016

Rotorua

À Rotorua j'ai retrouvé Christopher qui vit en Nouvelle-Zélande depuis deux ans. Au départ, il était parti comme moi: à l'aventure, avec un sac sur le dos et avec la probable intention de rentrer au pays. Mais Cupidon en a décidé autrement! Ce coquin de bébé ailé hermaphrodite nu (je le décrit bien hein?) l'a amené à Cromwell où le jeune voyageur a rencontré Jennifer, une chilienne. Cette dernière était également partie sans imaginer qu'elle s'installerait ad eternam chez les kiwis. Aujourd'hui, ils sont mariés (depuis le 5 mars, youhou, félicitation!). 

Au départ, l'histoire n'était pourtant pas simple car les deux tourtereaux ne parlaient pas les même langues; pour Jennifer, c'était l'espagnol et pour Christopher, le français et l'anglais. Cela n'a pas découragé le jeune homme qui rêvait depuis longtemps d'apprendre la langue de Cervantes (à noter qu'il avait commencé à le baraguiner un peu lors d'un voyage en Amérique Latine). Ils ont donc discuté, discuté et discuté encore... jusqu'à ce que Christopher devienne parfaitement trilingue. Aujourd'hui, c'est donc en espagnol qu'ils communiquent au quotidien.

À mon arrivée à Rotoura, il était prévu que Christopher vienne me chercher après son travail. Mon bus étant arrivé bien avant qu'il ne termine, j'ai décidé de visiter le Rotoura Museum en l'attendant. Situé dans le "Government Garden", un magnifique jardin aménagé à la française, le musée prend place dans le bâtiment qui aceuillait autrefois les bains thermaux de la ville, la "Bath house". De style "Elisabetan Tudor", sa façade c'est l'un des édifices les plus photographiés de Nouvelle-Zélande... ce qui est parfaitement compréhensible!

"Government Garden" et la "Bath House".

Construit en 1908 pour accueillir des touristes venus du monde entier pour y faire des cures thérapeutiques, l'édifice est le premier investissement majeur du pays dans l'industrie du tourisme. Il faut dire que l'endroit a beaucoup de potentiel mais pour comprendre pourquoi, il faut mettre les choses dans leurs contextes...

L'île du nord se situe à proximité de "la ceinture de feu du pacifique", là où les plaques indo-australiennes et pacifiques se rencontrent. Les plaques entrent en collision, chauffant la roche et créant des chambres de magma qui chauffent les nappes phréatiques et peuvent parfois exploser sous forme de volcan. De ce fait, la ville de Rotoura se situe dans une région extrêmement active. Pour etre plus claire... la ville est située SUR un volcan GÉANT (les obsédés de l'insécurité devraient y faire un tour pour se faire une vraie idée de la notion). D'ailleurs son lac, du même nom, est une caldera formée par l'éruption d'un volcan... il y a bien longtemps. Quoi qu'il en soit, pas besoin d'être Einstein pour se rendre compte que Rotorua est située au coeur d'une zone géothermique: il suffit simplement d'ouvrir ses yeux, pour voir un peu partout des fumerolles de vapeurs s'échapper des fissures et flotter au dessus des jardins de certaines rues; et ses narines, pour sentir cette odeur de souffre un peu partout (il y en que ça dérange mais moi j'aime bien cette odeur, ça me donne envie de manger de l'omelette :P).

En gros, voilà pourquoi un tel lieu ne pouvait que se prêter à l'ouverture d'un immense centre thermal tel que la "Bath house". Heureusement, une partie du musée a conservé les anciens bassins et s'attache à expliquer aux visiteurs les différentes cures qui y étaient proposées.

Une autre partie du musée est consacrée aux tribus maori Te Awara qui comptent les descendants directs du groupe de polynésien svenu coloniser en premier la nouvelle Zélande avec le canoë nommé "Arawa". La tribu est basée autour de Rotorua et de Bay of Plenty.

Toujours dans le musée, une exposition permanente est dédiée à l'éruption volcanique la plus destructrice de l'histoire du pays. Cest aussi la dernière car elle remonte à 1886. Elle fut très brève mais extrêmement violente car le volcan (nommé "Mont Tarawera") s'est littéralement ouvert en deux créant une immense faille coûtant la vie à 120 personnes se trouvant dans le village "Te Wairoa". Une partie des victimes étaient des touristes qui se rendaient dans la région pour voir la "8e merveille" du monde: les "Pink terrasse" (des terrasses en silices de couleurs rosées). Celles-ci ont été complètement détruites par l'éruption et submergées par les eaux du lac voisin qui s'est considérablement agrandi avec l'éruption. Le village, enseveli sous une couche épaisse de cendre est désormais connu sous le nom de "Burried Village" et peut être visité. Un fait bien curieux dans ce drame c'est qu'un Maori tohunga (un prêtre) avait vu, dix jours avant le désastre, un canoë fantôme lui annonçant l'événement.

Bref, très instructif ce musée. Je le recommande vivement (ne laissez pas les 25$ d'entrée vous décourager)!
Les "Pink Terrasse " avant l'éruption de 1886.

Après la visite, Christopher est venu me chercher pour m'amener chez lui, au "Lake Ranch". Un endroit absolument charmant dirigé par Ross et sa femme qui s'occupent d'encadrer des groupes venus y passer des vacances. Le ranch propose principalement des activités équestres mais dispose également de terrains de tennis, de piscines, d'une petite ferme (avec des cochons, des poules, des dindes et même un âne) et d'un petit lac où l'on peut faire du kayak. Bref, l'endroit est un petit paradis et, alors que je ne comptais y rester que deux jours, j'y suis restée cinq.
Vue sur le lac du ranch depuis la maisonnette de Christopher
Chez Paul et Uria.
Autour de cette infrastructure, des petites mains travaillent pour faire en sorte que tout fonctionne... Jennifer fait partie de ce personnel et s'occupe de tout ce qui touche aux repas (elle fait les courses, prépare les plats et assure le service). En échange de ce travail colossal (que Jennifer a franchement du mal à gérer seule) elle est logée dans une toute petite maison constituée d'une seule pièce et d'une salle de bain. Aux vues de l'exiguité de l'endroit, le couple a demandé aux voisins, Paul et Uria, de m'héberger. Christopher n'a pas eu besoin d'insister beaucoup car Paul et Uria étaient plus que ravis de m'accueillir chez eux. Ce couple de maori travaille également au Lake Ranch, Paul s'occupe de l'accueil des jeunes et Uria aide Jennifer à la cuisine en cas de gros rush. Ce sont des gens adorable qui m'ont fait me sentir comme chez moi. Sans se rendre compte, ils forment une paire assez comique. Paul aime bien taquiner les gens et il est aussi très critique envers les kiwis; "stupid kiwis" est une de ses phrases préférée... Ils ne savent pas faire la fête, ne savent pas faire à manger, ne savent pas... faire grand chose. Et Uria le reprend sans cesse "don't be so silly Paul". Même si dans le fond, il est clair qu'elle est un peu d'accord. Il faut dire que, même si les choses tendent à s'améliorer, il existe encore beaucoup d'inégalités entre les maoris et les pakehas. Dans l'immense majorité des cas, les maoris sont situés en bas de l'échelle sociale et rencontrent pas mal de difficultés à s'intégrer notamment au niveau politique.
Christopher et Jenny (à droite), Paul et Uria (à gauche) et Connie, la soeur de Jenny (au centre).

J'ai oublié de préciser que je n'étais pas l'unique invité du couple. La cousine, la soeur et la nièce de Jennifer y étaient accueillis au ranch pendant 2-3 mois. Elles ont considérablement  aidé Jennifer à faire la cuisine (quoi que parfois les jeunes filles, en pleine puberté, étaient parfois davantage préoccupées par les jeunes maoris venant y passer des vacances que par les casseroles... Ce qui avait le don d'irriter considérablement notre  cheffe cuisinière!).
Moi et les supers nanas!
Quoi qu'il en soit... Après avoir passé une excellente nuit (pour la première fois depuis 14 jours, je dormais seule, sans odeurs de pieds, sans ronflements, sans lampe de poche à 2h du mat' et sans réveil qui sonne à 7h. ALLÉLUIA!), je suis allée en ville pour faire une marche autour du lac de Rotorua. Pour commencer, je suis arrivée, totalement par hasard, devant la "Te papaiouru marae" située dans le quartier maori "Ohinemutu". Cet endroit a été une superbe découverte! Immaginez, un village maori (et pas une bêtise touristique non! Un vrai village avec des gens qui y vivent et tout!) offrant une vue imprenable sur le lac avec ses maisons, son cimetière et sa salle de réunion... Et pour couronner le tout, la St. Faith Anglican Church: un vrai exemple de ce que peut être un mélange de deux cultures. Il s'agit d'une église entièrement décorée dans le style maori (gravure sur bois, panneau à décors géométriques tressés, etc.) dans le respect de la litturgie chrétienne. Le meilleur exemple de cet étrange mélange se situe à droite du coeur de l'édifice; en transparence sur une fenêtre on peut voir un christ marchant sur le lac et... habillé d'un manteau maori)!!! Il faut être à la mode pour gagner le coeur des gens... il a tout compris J-C!

La maison de réunion de Ohinemutu.
St. Faith Anglican Church.
La nef principale de St. Faith.
Le Christ maori
Après la découverte de ce trésor caché, j'ai marché jusqu'à la Sulfur bay, une zone très intéressante d'un point de vue géothermique. J'y ai vu des plantes très curieuses qui ont évolué de sorte à pouvoir vivre dans ces conditions ainsi que des oiseaux venus chercher de la nourriture dans la baie. On y trouve également des "maori warden" qui vous arrêtent pour vous dire de changer d'itinéraire. Euh ouais... deux d'entre eux m'ont interpellée un peu paniqués pour me dire que je me dirigeais dans une zone très dangereuse de la Sulphur Bay... je me suis donc gentillement écartée du chemin tout en me disant que le sentier de randonnée était bien balisé et que je n'avais pas du me tromper. Quand ils sont partis, j'ai re-jeté un bref coup d'oeil à mon plan du secteur et, convaincue que j'étais sur le bon chemin, j'ai discrètement rejoint le sentier à nouveau. Et je ne m'étais pas trompée car j'y ai croisé des randonneurs et même des gens qui s'était écartés de la zone balisée pour observer les formations de souffre de plus près (alors que des avertissements ornent le bord des sentiers un peu partout). Bref, j'ai pas trop compris...
La Sulphur Bay.
Les sols fumant qui bordent la Sulphur Bay.

Le lendemain, je suis allée au marché où j'ai pu m'acheter un "hangi". Il s'agit d'un plat traditionnel maori qui combine une viande (le plus souvent de la volaille) avec des pommes de terres, du kumara (patate douce) et des herbes. Le hangi est aussi associé à une méthode de cuisson qui consiste à cuir les aliments à l'étouffé dans un trou creusé dans le sol. Pour un premier essai c'était plutôt pas mal... par contre le pain frit qui accompagnait mon plat (une autre specialité maori semble t-il) était beaucoup moins léger et raffiné. Heureusement, les oiseaux se sont chargés de me filer un coup de bec. Pour digérer, je suis allée me promener au Kuirau Park où l'on trouve des mares d'eau chaude aux couleurs incroyables.
Yummy Hangi; avec une présentation est un peu lacunaire je dois avouer. (Et par pitié, pardonnez-moi pour le sac plastique mais ça coulait de partout!!!)
Magnifique mare colorée.

Le ranch est situé tout près des "Hells Gate", le parc géothermal le plus actif de Rotoura. De part cette proximité, il ne fallait absolument pas que je le rate. Franchement, l'entrée est un peu chère (à l'instar de tous les autres parcs de ce genre dans la region) mais ça vaut vraiment le coup! On se croirait dans un autre monde: volcan dans lequel la boue mijote (l'eau est si chaude que la boue est déjà sèche en sortant), petits lacs acides aux belles couleurs, sols recouverts de cristaux de souffre, bassins d'eau bouillante... absolument fascinant! On y trouve aussi  le seule complexe de bain de boue de Nouvelle-Zélande (mais attention,  il faut payer un supplément). D'après la légende maori,  une princesse se suicida après une querelle domestique dans l'une de ces mares qui porte désormais le nom de la jeunes maoris, "Huritini" (je commence à penser que les maoris aiment bien les histoires dans lesquelles les gens se suicident, cf: la légende du Mount de Tauranga). En sachant que les maoris vivant à cet endroit mettaient leurs aliments dans ces mares pour les faire cuire, je vous laisse imaginer la scène (ou pas...).
Ce volcan boueux est actif et entre en éruption toutes les sept semaines.
"Les portes de l'enfer" portent décidément bien leurs noms.
Vous prendrez bien un bain de boue à 110°C?
Jolies cristaux de souffre proche de la "gueule du diable".

Il y aurait encore beaucoup à dire sur cet endroit très riche et sur ces superbes journées que j'y ai passé... Malheureusement j'ai du retard sur mes articles et je vais m'arrêter là.  Je voulais cependant conclure tout ça en remerciant très chaleureusement Christopher et Jennifer pour leur super accueil. Je leur souhaite par ailleurs tout le meilleur pour leur nouvelle vie de couple marié. Je souhaite également exprimer toute ma gratitude à Paul et Uria qui sont des gens absolument charmants et qui m'ont reçue avec le coeur sur la main. À tout ce beau monde: un grand merci!

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